Le blog de VOS histoires

Dans ce blog, nous publions les histoires, souvenirs, idées, potins… que vous nous adressez à hello@mymontreux.ch
Nous nous réservons le droit de choisir les meilleurs. De préférence se rapportant à notre région. Aucune attaque personnelle, pas d’injures, etc. bien entendu. MERCI !

Paru le: 18/10/2014

Vernex, à l’heure de la récré.

Lorsque retentissait la sonnerie aigrelette de la récré, nous descendions les escaliers quatre à quatre, tel un torrent tumultueux après un orage. Criant, riant et se bousculant, toute cette cohorte allait se déverser dans la cour en explosant de joie. 
Des groupes se formaient pour discuter quelques instants du cours qui venait de se terminer, mais rapidement ils se reformaient au gré des occupations pour nos quelques minutes de récréation. Il ne fallait pas perdre une miette de ce moment de liberté. 
Tandis que les filles papotaient, jouaient à sauter à la corde ou à la marelle, nous, les garçons, on se regroupait d’un côté de la cour pour jouer à la “tuve”, une occupation virile qui ne manquait pas de certains risques. 
Le sol de la cour était fait de carreaux gris qui avaient déjà passablement souffert de nos prédécesseurs. Certains de ces carreaux étaient cassés et de ce fait, nous procuraient la matière nécessaire pour notre jeu préféré. Répartis en deux équipes, nous nous acharnions à shooter un morceau de ce carrelage d’un camp à l’autre pour marquer des buts à l’équipe adverse. 
Ce bout de carrelage, nommé “tuve” pour Dieu sait quelle obscure raison, glissait dans la cour à toute vitesse. Il arrivait fréquemment qu’il s’élève et qu’il touche malencontreusement un tibia ce qui arrachait un cri de douleur à celui qui le recevait. Il y avait alors une très courte pause, juste le temps de relever le pantalon pour constater les dégâts et le jeu reprenait de plus belle. 
Nos chaussures ne sortaient pas indemnes de ces joutes. Leur cuir en était tout écorché sur le devant et elles avaient piètre mine après le match. On essayait bien de masquer le désastre avant de rentrer chez nous et on se dépêchait de se déchausser en arrivant. Il nous fallait quand même expliquer ça aux parents et surtout tenter de redonner un peu d’allure à nos godasses. 
Jamais chaussures n’auront été autant cajolées, cirées, lustrées jusqu’à ce qu’elles reprennent un aspect présentable. On y arrivait tant bien que mal et on ne manquait pas d’huile de coude pour ce faire. Finalement, elles brillaient de partout, sauf bien entendu sur le devant tout écorché qui restait d’un mat du plus bel effet. 
Mais l’illusion de durait que jusqu’au match suivant et rien n’aurait pu nous faire changer de jeu. 

Pierre-André Schreiber