Le blog de VOS histoires

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Paru le: 01/12/2013

La Prim’sup

Pour la rentrée en primaire supérieure de 1956, je n’étais pas sur les rangs. Un détour de huit mois par la France m’avait fait connaître d’autres profs, d’autres classes et bien sûr d’autres camarades. Mais ça c’est une autre histoire qui se passe loin de Montreux où je suis revenu alors que l’année scolaire était déjà bien entamée. 
Le Directeur du Collège avait été d’accord de me faire passer un test pour prendre place dans une classe. Mes notes précédentes aidant, j’avais donc pu intégrer la classe de Monsieur Rousseil. 
Ce personnage pittoresque qui m’amena jusqu’aux portes de ma vie de jeune homme mérite bien une petite description. 
Toujours de gris vêtu, le cheveu du même gris que ses costumes ou de son manteau en poil de chameau, portant béret, il avait plus l’air d’un apothicaire que d’un prof et n’aurait pas déparé la pharmacie Lecoultre située face au collège. 
Il se déplaçait sur un drôle de scooter vert pomme, été comme hiver et, bien sûr, il n’était jamais en retard. Dans une serviette en cuir noir dont les coins du rabat se relevaient, il trimbalait nos devoirs qu’il corrigeait chez lui à Belmont. 
Arrivé en classe il déposait sa serviette sur son bureau, enlevait sa pelisse ou son veston qu’il suspendait à une patère ainsi que son éternel béret. Puis il revêtait sa blouse, grise aussi, et se campait devant sa troupe de garnements pour le cours. 
Un jour qu’il avait laissé son béret sur le devant d’un pupitre, un farfelu d’élève ne trouva rien de mieux que de s’en saisir et de le balancer à travers la classe pendant que le prof était au tableau. Tel un fresbee, le couvre-chef atterrit devant moi. Aussi sec, je m’en saisis et je renvoie l’objet volant à l’expéditeur tandis que toute la classe éclate de rire… c’est le moment que choisit le prof pour se retourner et voir son béret se poser en douceur sur son bureau. 
S’ensuivit une longue tirade sur la politesse, un chapelet de remontrances dans lequel il ressortait qu’en jetant le béret j’avais manqué de respect à son propriétaire. Ce qui était ma foi très vrai. Bien fait pour ma poire mais j’en voulais à l’idiot par lequel arrivait la punition que le prof m’infligea. 
Cent fois ?Je ne dois pas manquer de respect à mon professeur”, c’était finalement pas cher payé et je m’en acquittai rapidement pour oublier ce malheureux incident, le seul de toute ma ?carrière? d’écolier…
Pierre-André Schreiber