Gevrey-Chambertin – Le vin de l’Empereur!
Napoléon ne brille pas par sa réputation de gourmet raffiné. Ses repas engloutis en moins d’un quart d’heure ont laissé plus d’un silence auprès des convives et autres invités de marque. Cependant, il se distinguait par son amour pour le Gevrey-Chambertin, l’un des plus grands vins de Bourgogne. C’était son vin préféré, son vin de tous les jours, qui le suivait dans chaque campagne militaire, y compris au cœur des plus terribles batailles. C’était le vin de l’Empereur. En Egypte, il en emporta tellement qu’il ne réussit pas à consommer toutes les bouteilles sur place. Ramené en France, le vin s’avéra toujours aussi plaisant, ce qui confirma son statut d’excellent vin de garde. Durant les grands froids de la campagne de Russie, en 1812, l’aide de camp de Napoléon conservait ce vin contre sa poitrine pour pouvoir, à tout moment, lui servir du vin chambré. Napoléon était-il alors un dégustateur hors pair en matière de vin ? Et bien non : fidèle à ses vieilles habitudes, il ne manquait jamais de couper son Chambertin avec un volume équivalent d’eau. Le pauvre Bertin, vigneron génial à l’origine de l’appellation Chambertin (littéralement Champ-de-Bertin), a dû se retourner plus d’une fois dans sa tombe …
Il est dit que c’est faute d’avoir bu son verre de Chambertin le jour de la bataille de Waterloo que Napoléon connut la défaite. Petite cause, grandes conséquences, cette anecdote est l’illustration napoléonienne de l’effet papillon. Le Chambertin devrait être obligatoire. Les anglais, victorieux à Waterloo rappelons-le, proposent une autre version : ils affirment que Napoléon aurait abusé de son vin préféré la nuit précédent la bataille et qu’il était saoul au combat, ce qui le fit tomber de cheval. De toute façon, que l’on considère la version française ou anglaise, l’évocation de Water-l’eau n’a que peu d’intérêt pour un amateur de vin (spéciale pour Roobert).
Outre le Chambertin, Napoléon ne dédaignait pas un verre de Champagne, sans jamais oublier d’y joindre au moins autant d’eau : c’était ce qu’il appelait sa « limonade ». Comme on peut le voir, l’Empereur était loin d’être un fin connaisseur et il est notable de constater que de célèbres citations en rapport avec le vin lui sont attribuées, à tort bien évidemment. Voici les deux plus connues :
A propos du Champagne, « Je le mérite dans la victoire, j’en ai besoin dans la défaite », Christian Pol Roger, propriétaire des Champagnes éponymes et grand ami de Churchill, à qui l’on attribue tout aussi faussement cette citation.
“Rien ne fait voir l’avenir couleur de rose comme de le contempler à travers un verre de Chambertin.” Alexandre Dumas
Enfin, les alsaciens prétendent que le riesling de Wolxheim était le vin préféré de l’Empereur. De l’Empereur certes, mais duquel ? Il semble en fait que l’on confonde Napoléon Ier et Napoléon III, et que ce soit ce dernier, lors d’un passage en Alsace, qui ait loué la grandeur du riesling.
Si l’Empereur a malmené ses Chambertins tout au long de son existence, il a aussi contribué à la réputation mondiale de ce vin unique. Mais ne comptez pas sur les Bourguignons pour l’appeler l’Empereur des vins ! Là-bas, chaque parcelle est un Empire.